Présentation de la Fringe Division

Steeve Sommers

Fils unique, Steeve Sommers vient d’une modeste famille texane. Il naît le 6 juin 1896 à D'Hanis, ses parents travaillent dans le ranch d’une riche famille d’éleveurs.

Adolescent à problèmes, souvent pris dans des affaires de bagarres et de chapardage, il développe rapidement un sentiment de jalousie vis-à-vis de la vie confortable menée par leurs employeurs et se jure de devenir riche à son tour.

 

1911. Suspecté -à raison-, dans une affaire de vol, il quitte à 15 ans sa famille, ses proches et ses études à la St. Anthony's School ; sans un sou en poche, il gagne par ses propres moyens New-York, vivant de petits larcins et de petits boulots.

Ses poings font merveille lors des combats clandestins auxquels il participe mais, après avoir fréquenté quelques temps un gang du quartier de Five Points, un faubourg pauvre de la ville, il décide de s’engager comme beaucoup d’autres dans l’armée yankee, plus pour apprendre le maniement des armes que par patriotisme.

 

Mais la Première Guerre Mondiale ravage l’Europe.

Après quelques dernières provocations allemandes, comme le projet d’accord avec le Mexique ou le torpillage du navire US « Villengia », les Américains entrent en guerre le 6 avril 1917. Leur armée de métier de 200 000 hommes n’est pas prête pour se projeter dans le conflit européen, tout est à réaliser : hommes, matériel et transport. En mai 1917, l’armée US ne dispose en effet que de 600 000 fusils, 2 000 mitrailleuses et 900 pièces d’artillerie de campagne.

Les Etats-Unis mobilisent par le « Selective Service Acté » les classes de 21 à 30 ans. Leur armement de départ sera limité à l’infanterie.

Une mission française Joffre-Viviani se rend fin avril aux Etats-Unis pour définir les modalités du concours militaire des Américains, et elle obtient l’expédition d’un corps expéditionnaire dès juin 1917. Leurs armes seront des mitrailleuses françaises, avant l’arrivée des mitrailleuses « Browning » à la fin du conflit, et les fusils anglais « Enfield », chambrés à la munition U.S.

Afin de renforcer le moral allié, un premier (petit) contingent de 14 500 hommes débarque à Saint-Nazaire le 26 juin 1917.

Avec leur uniforme vert olive, leurs feutres à large bord, leurs ceinturons à poches multiples et leur allure de cow-boy, ils sont appelés les « Sammies » (en référence à l’Oncle Sam) ou les « Doughboys » (leurs vareuses portant des boutons comparables à des beignets, ‘doughnut’ en anglais).

Ces troupes sont affectées à un secteur relativement calme du front, près de Toul.

 

En 1917, Steeve Sommers a 21 ans. Il se débrouille pour faire logiquement partie de ce premier contingent U.S. envoyé sur le Vieux Continent.

Face à la déflagration de la Première Guerre Mondiale, le monde est perplexe : ce conflit signe-t-il la fin d’un monde ou le commencement d’un autre ?

Steeve Sommers pense la même chose : Quoi de mieux que le Vieux Continent, qui devra forcément se reconstruire après la guerre, pour faire ses armes contre l’armée allemande et faire ensuite fortune ?

 

Rapidement, doué pour l’infiltration, tireur d’élite, le jeune militaire franchit les échelons hiérarchiques, et, devenu lieutenant, il rejoint bientôt le front où il effectue de nombreuses opérations commando en compagnie des poilus français. Mais, face aux horreurs des tranchées et à la folie de la guerre, il décide de déserter.

Lorsqu’il doit achever de ses propres mains son frère de combat Marcel Franchard, après que celui-ci ait eu les jambes arrachées par l’explosion d’un mortier allié alors qu’ils effectuaient tous deux une mission d’infiltration derrière les lignes ennemies, il quitte la France et, porté disparu, il rejoint clandestinement l’Egypte où il se mêle comme combattant indépendant aux contingents anglais et français du commandant Allenby : Sir Edmund Henry Hynman "The Bull" Allenby.

Ce-dernier, après avoir accéléré la capitulation ottomane avec Lawrence d'Arabie et ses volontaires arabes et repris Damas le 2 octobre, terminera d'ailleurs sa carrière avec le rang de général et obtiendra le titre de Haut commissaire britannique en Egypte.

 

On retrouve également Steeve Sommers participant à l’offensive du 4 juillet 1918 contre Hamel, appuyant les soldats australiens qui, sous le commandement du Général Monash, s’emparèrent de la ville et firent près de 1900 prisonniers.

L’opération fut un modèle de coordination de l’infanterie, de l’artillerie et de l’aviation.

 

Mais une rumeur prend naissance dans les sables du désert arabique, on parle de l’existence d’une cité mythique, Kor, la mère de toutes les villes, qui recèlerait tout le pouvoir d’objets antiques …

Steeve Sommers profite donc de sa présence sur place pour visiter quelques sites archéologiques (comme la Nécropole de Saqqarah par exemple) où, pilleur de tombes, il revend au marché noir de nombreuses reliques et objets antiques.

Sans attendre la fin de la campagne d’Egypte et de Syrie et la capitulation turque, signée le 30 octobre 1918, il retourne en France et, clandestinement, usant de ses nombreux contacts noués en France et en Egypte, il devient « business man indépendant ».

 

1919, les cendres de la Première Guerre Mondiale sont encore tièdes.

Steeve Sommers vend désormais ses services contre monnaie sonnante et trébuchante, trafiquant d’armes, vendeur d’antiquités au marché noir. Il habite Paris et n’hésite pas non plus à offrir ses talents de détective pour retrouver des individus ou des objets de valeur disparus pendant la guerre … On ne lui connaît aucune relation sentimentale stable.

 

C’est au début de l’année 1924, au cours d’un dîner privé mondain organisé par un cercle d’amateurs d’art parisien, qu’il rencontre Mr. Whitesnake, un riche américain. Ce-dernier a entendu parler de lui et lui propose un emploi à durée indéterminée. Il a l’intention de créer dans la région de Boston son musée personnel d’objets surnaturels; en échange d’un confortable salaire, Sommers devrait veiller à ce que ses acquisitions voyagent sans encombres ! A 28 ans, Steeve Sommers, qui commence à s’ennuyer, saisit l’occasion. Les Etats-Unis commencent à vivre à l’heure de la prohibition, et il devrait pouvoir retourner à présent dans son pays pour en profiter. L’argent amassé en Europe, et sa réputation ici, allaient lui offrir le tremplin dont il avait besoin pour faire fortune là-bas …

 

 

Il accepte l’offre de Whitesnake et rencontre alors Arthus de Kerouac, un rat-de-bibliothèque français.

Récemment embauché lui aussi par l’homme d’affaires, le Français se révèle être un survivant de la Grande Guerre comme lui, vétéran du chemin des dames reconverti dans le commerce et la recherche de reliques profanes. Âgé de 33 ans, l’homme court le monde, loin de la folie du monde occidental, pour étancher sa soif de connaissances archéologiques et oublier la folie de la guerre et la boucherie des tranchées.

Ils regagnent tous deux Boston par bateau, en profitant pour faire connaissance. A leur arrivée, Whitesnake leur présente Seth O’Rearly, un jeune explorateur irlandais de 25 ans, un peu porté sur la bouteille, qui va faire équipe avec eux …

La Fringe Division était née.

La Lee Enfield de Sommers
La Lee Enfield de Sommers

Arthus de Kerouac

Arthus de Kerouac a 25 ans lorsque la grande guerre éclate.

 

Issu d’une ancienne famille bretonne, il a pendant son adolescence parcouru les landes du ponant, la tête remplie des légendes celtiques qui ont bercé son enfance.

Ce goût pour la petite histoire l’amène à 18 ans, son baccalauréat en poche, à poursuivre des études d’histoire du Moyen-âge à Paris.

 

 

Il devra cependant patienter trois ans avant de faire ces universités, puisque que vient l’âge de la conscription ; il doit passer par la case militaire. Son niveau d’étude lui permet de passer des concours d’officier qui l’amène au grade de lieutenant dans l’infanterie.

Pendant ces trois années, le jeune homme apprend le maniement des armes et la conduite de véhicules à moteur et le prestige de l’uniforme sur la gente féminine.

 

Libéré enfin de ces obligations militaires, Arthus entre enfin à l’université.

Comme il faut bien faire bouillir la marmite, sa famille étant quelque peu désargentée, il trouve un emploi d’assistant chez un antiquaire, vieil ami de son père.

La galerie du marchand d’art, située entre Saint Germain et Notre Dame expose principalement des œuvres que l’on retrouverait de nos jours au Musée du Quai Branly : Masques africains, Idoles Inuit, statuettes rituelles de Bornéo, trésors égyptiens, antiquités incas, …

Chaque heure passée dans cet endroit est pour Arthus une invitation au voyage, qui du coup abandonne l’étude de l’histoire après un trimestre, pour se passionner pour l’histoire de l’art et l’archéologie.

 

Il profite de l’été 1913 pour se rendre en Egypte, en tant qu’assistant de l’égyptologue Pierre Lacau sur la nécropole de Saqqarah. Le jeune Arthus est émerveillé par les trésors et les mystères que renferme ce site et est enthousiasmé par l’ambiance de cette communauté internationale de chercheurs qui réside au Caire.

Il y fait la connaissance de Lisebeth Cornwell avec qui il vit sa première vraie relation sentimentale.

 

Ce séjour qui devait durer 3 mois, Arthus le prolonge jusqu’au printemps 1914.

 

De retour en France, la guerre gronde, Arthus est mobilisé.

La folie de la guerre et la boucherie des tranchées resteront à jamais gravées en lui.

Pendant cette période effroyable, où il frôle la mort à plusieurs reprises et perd des fragments de son humanité, Arthus se fait la promesse, s’il survit au carnage, de repartir loin de la folie du monde occidental pour courir le monde et étancher sa soif de connaissances archéologiques.

La canne-épée d'Arthus
La canne-épée d'Arthus

Marvin O'Donnell

Marvin est né à Chicago dans une famille fort aisée de la ville. Son père, un des notables du coin et figure de l’Irish spirit, était l’un des chefs de la police. Il était réputé pour sa dureté et son ardeur au travail. En outre, le frère de sa mère (donc son oncle) était un général 5 étoiles de l’Armée de Terre : Le mariage de ses parents était donc l’union de 2 familles riches et réputées de Chicago, et la famille s’installa rapidement dans une maison très chic du quartier de Lincoln Park.

Marvin a une grande sœur, Sarah, de 3 ans son ainée, mariée avec un promoteur immobilier en charge de la construction des nouveaux buildings le long de Michigan Avenue … La classe !

 

 

L’enfance de Marvin aurait pu être fort différente sans l’éducation très dure de son père, et surtout la mort malheureuse de sa mère alors qu’il n’avait que 3 ans … lors de la Saint Patrick … Cela n’avait jamais été très clair, elle serait tombée du haut d’un chantier (Marvin en conclura bien plus tard qu’il aurait pu s’agir d’un suicide).

 

Marvin était un enfant éveillé et fort doué … L’éducation dans les meilleures écoles de la ville n’aurait dû que confirmer ou améliorer ses dons innés … Mais élevé par une sœur austère et un père très ferme, Marvin s’était très vite transformé en garçon rebelle, bagarreur et assez dilettante … Il fut renvoyé de toutes les écoles, jugé trop incontrôlable.

Faute de mieux et avec l’aide de Papa (qui dut mettre un mouchoir sur les ambitions qu’il avait pour son fils), il entra dans la police de Chicago comme inspecteur en 1907.

 

Contre toute attente (il en fut le premier surpris), ce travail le passionna et, passant des mœurs aux criminels, il se fit une excellente réputation de détective, intuitif, coriace, assez droit et « rentre dedans » … Il résolut maintes affaires de toute sorte et s’établit dans Chicago un solide réseau parmi les forces de l’ordre, les putes, les journalistes et la mafia …

Il aurait d’ailleurs pu faire une grande carrière (sur les traces de son père) s’il n’avait pas eu ce foutu caractère d’insubordonné et de bagarreur féroce avec un peu d’alcool dans le sang … Il cassa plus d’un nez ou une mâchoire de suspect, voire de collègues …

Il resta donc inspecteur principal sans aucun espoir de promotion …

Et cela lui allait très bien comme ça … entre 2 cuites ou 2 paris sur le baseball …

 

Marvin ne partit pas pour la Grande Guerre, car membre de la police de Chicago.

Lorsque son père se suicida le 13 Septembre 1917, il fut extrêmement affecté … Il ne pourrait plus jamais « normaliser » ses relations avec son paternel … Plus troublant, la lettre d’adieu de son père mentionnait une situation privée intenable, un mensonge d’une vie qui ne pouvait plus être caché …

En enquêtant de son côté, Marvin découvrit que son père avait une double vie et entretenait une relation homosexuelle avec un gigolo (Bobby Palama dit ‘Beau Pâle’) ; ce dernier le faisait chanter depuis des années … Du fric, des passe-droits, des biens en nature, la facture était de plus en plus salée pour le pauvre vieux … Il avait préféré en finir pour arrêter la spirale infernale … sans penser ou oser en parler à son fils … Ecœurant.

 

Le 13 Septembre 1918, on retrouva Bobby la gueule défoncée et les couilles écrasées à coup de barres de fer dans un des nombreux chantiers de building de la ville à deux pas de Michigan Avenue. Sept mois plus tard, une fusillade éclata dans un bar malfamé du Loop de Chicago : 4 morts par balle (au canon scié et au colt 45), dont le responsable de l’établissement, un mac notoire du milieu homosexuel ... Plus un blessé sérieux, l’inspecteur O’Donnell.

Officiellement, l’inspecteur enquêtait sur un réseau de prostitution et de contrebande et s’était retrouvé piégé dans un guet-apens … Officieusement, on retrouva chez le mac un dossier sur le père O’Donnell et des notes indiquant qu’il fallait commencer à faire cracher le fils …

 

Par égard pour le clan O’Donnell, l’histoire fut étouffée avec l’art et la manière, et Marvin « fut démissionné » le 6 Juin 1919.

Après quelques mois de trou noir, Marvin décida pour payer les factures, les bouteilles et les paris, de s’installer à son compte comme privé, histoire aussi de faire les seules choses qu’il savait à peu près bien faire : dérouiller les emmerdeurs, bastonner les coriaces, suivre les trous du cul, retrouver des paumé(e)s, interroger les putes et les maris trompés …

Bref, faire une bonne action de temps en temps avec ses poings, son flingue … ou avec tout simplement une bonne bouteille de 30 ans d’âge … A votre santé !

Marvin aime les solutions pêchues
Marvin aime les solutions pêchues

ALASTAR Ó GHALLACHÓIR

Alastar : forme irlandaise du prénom d’origine grecque Alexandre, de alexein signifiant protéger, défendre, et de andros signifiant homme.

Ó Ghallachóir, prononcer [o gallakoar] : forme anglaise de Gallagher qui signifie : l’ami des étrangers.

Prêtre illuminé né en 1885, originaire d’un petit village irlandais, Alastar Ó Ghallachoir cache un sombre et profond secret derrière sa façade d’homme de foi. C’est à l’âge de 8 ans qu’Alastar fut abandonné par ses parents qui, peu de temps après l’avoir déposé aux portes de l’un des nombreux orphelinats catholiques de Wesport, s’ôtèrent la vie. C’est ens’immolant par le feu, hurlant aux passants terrorisés et ce jusqu’à leur dernier souffle que leurs âmes devaient être purifiées, que ses parents trouvèrent le repos éternel. Implorant jusqu’à la toute fin le pardon du Seigneur de n’avoir pas eu la force et le courage de faire ce qui devait être accompli.

De sa vie avant l’orphelinat, Alastar ne conserve, si ce n’est d’avoir appartenu à une famille semble toute nombreuse, que de vagues et sombres souvenirs. Encore aujourd’hui, il lui arrive assez fréquemment de se réveiller hurlant, nuit après nuit, assailli par de terrifiantes et puissantes visions, de sombres et horrifiques cauchemars, souvenirs et cicatrices profondes d’une vie passée dont son esprit arrive encore à occulter la majeure partie. Son enfance ne fut pas ce que l’on peut appeler des plus heureuses, rejeté, délaissé, devenu le souffre douleur de ses camarades. Il ne trouva compassion et amour qu’auprès de l’un des prêtres en charge de leur éducation. L’Homme de Dieu, voyant que l’enfant ne convenait, et ne parvenait jamais à les convaincre, aux nombreuses familles se présentant à l’orphelinat, le prit sous sa protection, l’éduquant et lui enseignant le latin entre autre … Alastar se prit d’amour pour cet homme et vit en lui le père dont il n’avait souvenir. Mais plus grand encore était l’amour qu’il portait au Livre Saint, parole de vérité à ses yeux. Alors que la Grande Guerre faisait rage, Alastar, âgé à cette époque de 32 ans et peu de temps après avoir été ordonné prêtre, se porta volontaire en 1916, estimant que sa place se trouvait sur le front, là où la souffrance et la douleur étaient grandes et nécessitaient à ses yeux la présence de Dieu. Alastar se retrouva rapidement, et selon ses souhaits, dans la terrifiante guerre des tranchées, là où Satan et la folie avaient pris place dans le coeur et l’esprit des hommes. C’est ainsi couvert de sang au milieu de la barbarie humaine, piétinant les cadavres des défunts, octroyant les derniers sacrements aux malheureux soldats irlandais combattant encore pour la couronne d’Angleterre et prêts à rejoindre notre créateur, que pour la première fois sa foi en notre Seigneur fut ébranlée, devant l’horreur et l’ignominie des combats. 

Mais plus encore, ce fut lors de cette terrible nuit où il se réveilla hurlant, pris d’une frénésie meurtrière, les mains couvertes de sang … le sang de ses camarades morts à ses pieds, une baïonnette dans la main droite et un modèle standard d’arme de poing de l’armée de sa Majesté dans la gauche, qu’Alastar constata que l’étui de l’officier qui commandait l’escouade, avec laquelle il avait partagé la veille les maigres rations de combat, était vide. Pour la première fois, son esprit vacillât. Du moins la première fois qu’il se souvienne. 

Personne ne le soupçonna jamais, lorsqu’il fut retrouvé errant en plein No Mans land, le regard perdu dans le néant, son habit d’Homme d’Église souillé, implorant que Dieu lui vienne en aide en récitant sans cesse les versets des Saintes Écritures, suppliant le Seigneur de guider ses pas dans la compréhension et la rédemption des actes dont il fut témoin et l’auteur. Personne ne le soupçonna … Mais au plus profond de son âme, Alastar s’accrochait désespérément à sa foi, luttant contre les ténèbres qui menaçaient d’engouffrer son entendement dans le néant. La guerre prit fin, comme toutes les guerres, et de retour aux pays, on confia à Alastar l’église de son village natal … 
Il vit en cela, du moins s’en convainquit, que le Seigneur lui envoyait là un signe dans le pardon de ses péchés … malgré les sévices corporels qu’il s’infligeait en se flagellant dans l’espoir du salut de son âme, seul dans la nuit, dans la solitude de sa chambre, alors que tous dormaient dans le village.

Alastar attachait une réelle importance dans l’exécution des tâches qui lui incombaient, espérant ainsi être la lumière de nombreux de ses paroissiens, qui semblaient avoir quitté les voies du Seigneur pour rejoindre un étrange ordre ésotérique dont les croyances lui étaient inconnues. Du moins jusqu’au jour où son village fut attaqué, pris d’assaut par des ombres sans nom sorties tout droit des profondeurs de l’océan … Alastar échoua à protéger qui que ce soit. Refusant et craignant de prendre à nouveau les armes, terrifié de ce qu’il pourrait advenir, il pria longuement recroquevillé dans son église, dans l’espoir et l’attente d’une quelconque aide divine qui ne parvint jamais, tandis que les villageois se faisaient massacrer, dévorer dans la nuit sans qu’il ne fît rien.

Ce n’est que lorsqu’il se décida à quitter le choeur de son église, là où il s’était lâchement réfugié loin de la vision des horreurs de

la nuit, ouvrant ainsi à nouveau les portes de l’édifice à la lumière du Seigneur, qu’il aperçut pour la première fois ce symbole blasphématoire, cette étrange pentagramme dessiné à la hâte sur les portes de son église, sûrement à l’aide du sang d’un des malheureux habitants, comme un acte de défi à la Gloire de Dieu. Depuis ce jour, il doute de lui-même, mail il craint aussi que Dieu ne l’ait abandonné. Il sait qu’un jour, il devra faire face à ses propres démons et qu’il devra choisir entre accepter de prendre les armes et lutter contre le Mal qui corrompt notre monde ou finir sa misérable vie dans la peau d’un couard, d’un ignoble lâche.

 

Ayant fui en Amérique, il erra en quête d’un signe divin lui permettant de racheter ses fautes et ses péchés. Il se montre quelque peu rustre et ne supporte pas ou peu le contact physique. Il serait presque normal, s’il se lavait plus souvent, apprenait l’existence des rasoirs ou cessait de compulser des grimoires moisis à la recherche de réponses qui ne venaient pas. Il vivait retiré dans une église à l’abandon, vivant de mendicité ou se délectant de son fameux ragoût de rats qui avait si souvent rempli son estomac dans l’horreur des tranchées… Parfois, le Dr Singer venait déposer de la nourriture ou un peu d’argent, voyant en lui un homme de valeur … mais pour qui la vie ne fut pas facile. Depuis peu, il recevait aussi la générosité d’un certain Mr Whitesnake, un bourgeois de Boston qui essayait de l’aider à remonter la pente. Mais le souhaitait-il vraiment ?

Un jour, par le truchement du Dr Singer, Mr Whitesnake invite Alastar à se rendre chez lui à Boston dès le 21 décembre, afin de ”discuter” avec lui de l’intérêt ou non de l’engager dans une “affaire”. L’homme pensait qu’un regard pieu sur ses centres d’intérêt pourrait lui être réconfortant, et le Dr Singer pensait que ce n’était pas un mauvaise idée ; lui même souhaitait rejoindre les locaux de Whitesnake d’ici le 30 pour répondre à son invitation. Le nécessaire avait été fait pour fournir un billet de train à Alastar et lui prendre rendez-vous chez un tailleur pour … l’habiller d’un costume moins élimé ! Voilà plus de 15 ans qu’Alastar se morfondait, dans le souvenir de cette terrible nuit où sa couardise avait pris le pas, et il était grand temps qu’il se ressaisisse. Si sa résurrection, pour se faire, passait par accepter l’offre de ce Whitesnake, qu’il en soit ainsi ! Les voies du Seigneur sont impénétrables … De plus, il y a fort longtemps qu’il n’avait pas porté de vêtements qui ne fussent souillés. Alastar Ó Ghallachoir accepte donc l’invitation chez ce tailleur en espérant qu’il soit maître en la matière. A son arrivée, Whitesnake lui confia un livre écrit par une certaine Matilda Prescott et intitulé « A Burrower’s world ». Après trois heures de lecture, Alastar referme le bouquin et, horrifié par cette lecture, il s’affale dans son fauteuil, allumant une cigarette et se servant un armagnac pris dans la réserve personnelle de son hôte, bouteille qu’il avait prise avant de commencer sa lecture et qui était déjà bien entamée. « Que le seigneur guide mes pas et me donne la force de lutter contre les horreurs que je me m’apprête à affronter » murmura le prêtre avant de s’endormir en récitant quelques prières, espérant que sa nuit ne soit pas parsemée de cauchemars. Hormis ses appartements, son hôte lui avait laissé accès à la totalité des lieux. Son bureau n’était évidement pas trop accessible, car il y travaillait la plupart du temps, mais sa bibliothèque privée était assez copieusement fournie en livres d’art, d’histoire de l’art et d’anthropologie. Peu d’ésotérisme, et rien qui lui parut en relation avec ce qu’il venait de lire. Son “musée” privé se composait de beaucoup de poteries, et de 2 lances sumériennes magnifiquement conservées, reproductions de statues de l’Île de Pâques …

 

Whitesnake profite de sa présence pour s’entretenir avec lui ; son majordome lui fait visiter Boston et l’emmène voir l’appartement qu’il pourra occuper s’il accepte sa proposition d’emploi : un deux pièces confortable, situé au 69 Temple Street, comme ceux de ses futurs collègues, pas très loin de ses bureaux. Whitesnake aimait aussi passer du temps à table, et ses cuisines offraient d’excellents repas. Il y explique à Alastar que depuis la nuit des temps, les forces obscures décrites par l’auteure menaçaient l’humanité et que malheureusement, il n’existait rien d’organisé pour les combattre et qu’on pouvait aisément imaginer que les strates du pouvoir soient de plus corrompues et qu’il soit peut-être plus sage d’agir dans l’ombre. En dehors de ces moments, l’homme passait son temps dans son bureau à gérer ses affaires, dans l’immobilier et la construction principalement.

Contre un toit, un salaire décent et un approvisionnement régulier en armagnac.

Alastar Ó Ghallachoir finit par accepter la proposition de Whitesnake, qu’il scelle par une virile poignée de main et un crachat bien irlandais.

Cependant, il avait quand même envie de savoir à qui il avait à faire et, après s’être renseigné sur le Texan auprès du Dr Singer, il décide d’engager un détective pour fouiller un peu dans la vie de Whitesnake.

Il découvre aisément que l’homme est originaire de Fort Worth, non loin de Dallas. Mais compte tenu du coût des frais de déplacement du détective bostonien jusqu’au Texas, il préfère décrocher le téléphone et demande à l’opératrice de lui en trouver un sur Dallas : « Vous fallait un rapport détaillé sur les activités de vot’ gars jusqu’à son départ de la région ? Devrait pas me prendre trop de temps ! Ce s’ra 10 $ par jour plus les frais éventuels. Envoyez 2 jours d’avance par Western Union et j’m’y colle illico ! »

Alastar paie sans hésiter.

 

Peter F. Whitesnake est né Peter F. Barnes à Fort Worth au Texas. Son père (Robert Barnes) était dans le pétrôle et son entreprise fonctionnant lui avait apporté une certaine richesse. Sa mère avait des origines indiennes (amérindienne).

 

A la mort de son père voici 5 ans, Whitesnake a pris le nom de sa mère, a vendu toutes les concessions de son père à la famille Ewing (famille montante au Texas). Il a installé sa mère dans une belle propriété de San Francisco et est parti pour l’Europe et l’Afrique du Nord après avoir investi la majeure partie de sa richesse dans diverses entreprises, notamment la construction et l’immobilier.

 

 Son activité principale depuis son retour d'Europe est le marché de l’art et de l’antiquité.

 On sait également qu’il a été proche de certains cercles secrets en Europe, probablement franc-maçon ou quelque autre société secrète assimilée. Il a passé du temps en Europe auprès de Rudolph Steiner, fondateur du mouvement philosophique "l'Anthroposophie" et a, avant de revenir aux States, lancé des demandes de fonds en vue de financer la construction en Suisse d’un bâtiment "le Goetheanum 2" dessiné par Steiner, un véritable centre de recherches et d’éducation artistique aliant modernisme, classicisme et liberté philosophique qui devra prendre place sur les lieux du premier bâtiment détruit la nuit du 31 décembre 1922.

 

De retour à Boston, Whitesnake gère ses affaires sans trop faire parler de lui et participe à la construction suisse qui va débuter début 1925.

 

 

Le professeur J. Singer 

Singer sait manier le fouet !
Singer sait manier le fouet !